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Dix mois de prison pour avoir suivi des cours de premiers soins

09dec2011

Gabriela

Permettez-nous de vous présenter Jovita Montes. Philippine, psychologue et collaboratrice de l'organisation de défense des droits de l'homme Gabriela. Tout comme de nombreuses autres femmes de sa trempe, elle prend fait et cause pour les droits de la femme et de l'enfant aux Philippines. Un engagement pour lequel celles-ci payent souvent le prix fort. L'année dernière, la police d'État a procédé en une fois à l'arrestation de 43 collaborateurs. Jovita témoigne.

43 personnes, c'est tout de même énorme, non ?

En effet. C'est la première fois que la police procède à une arrestation de cette ampleur. La plupart du temps, ils n'arrêtent qu'une seule personne à la fois. Ou parfois deux ou trois.

Que s'est-il passé exactement ?

L'année dernière, Gabriela avait organisé une formation de six jours sur la petite chirurgie, à l'intention de nos collaborateurs spécialisés dans le domaine de santé. Des militaires ont surgi et ont emmené 43 des participants. Mon oncle, l'un des deux médecins arrêtés, était parmi eux. Aucune explication ne nous a été fournie, aucun renseignement communiqué. Les policiers n'avaient même pas de mandat d'arrestation. Les participants ont été emmenés en prison et ont été soumis à des tortures psychologiques. Ils ont dû garder un bandeau sur les yeux et sont restés menottés pendant plus d'une journée. Les femmes n'étaient même pas autorisées à se rendre seules à la toilette.

Après dix jours, nous avons enfin pu leur rendre visite. Nous avons alors appris qu'ils étaient accusés de faire partie de la « New People's Army » (NDLR : une organisation terroriste paramilitaire qui souhaite lancer une révolution communiste aux Philippines). Mais ce n'était pas la véritable raison de cette arrestation. Le but était en fait de semer la peur au sein de notre organisation et de notre parti.

Nous avons lancé une campagne internationale et avons cherché un soutien juridique. En décembre 2010, après une campagne de dix mois, les prisonniers ont finalement été relâchés. Vous imaginez ? Dix mois de prison pour avoir suivi des cours de premiers soins ! Bon nombre d'entre eux ont été profondément marqués par cet événement. L'un des médecins ne veut plus laisser ses enfants seuls. Et une autre travaille désormais à mes côtés comme infirmière, mais a encore de grosses difficultés à se remettre de ce traumatisme.

Gabriela constitue-t-elle une si grande menace politique ?

Nous commençons effectivement à avoir de plus en plus d'influence dans la politique Philippine. Nous sommes très actifs au sein du congrès, où notre parti occupe systématiquement un siège. Nous tentons actuellement de faire passer le « Productive Health Bill ». Hélas, l'Église catholique interprète notre proposition comme un projet de loi sur l'avortement et s'y oppose fermement. Notre proposition a donc été introduite, mais elle fait encore l'objet de débats en séance plénière.

En revanche, plusieurs propositions ont déjà abouti et ont été transposées dans la législation. C'est notamment le cas d'une loi contre la violence conjugale et familiale, entrée en vigueur en 2004. De même, en 2008, une loi contre la traite des êtres humains a été adoptée. Désormais, les autorités s'attaquent à la source du problème plutôt que de se contenter d'arrêter les prostituées et de les poursuivre en justice.

Comment utilisez-vous les fonds que vous fournit Ello ?

Nous utilisons tout d'abord cet argent pour fournir des services liés à la défense des droits de l'homme. Si quelqu'un est par exemple arrêté à tort, si une famille se fait harceler ou si des personnes sont victimes du militarisme, nous les aidons à défendre leur cas. Et si la situation les oblige à déménager, nous nous chargeons du logement, de la nourriture et du transport.

L'argent nous sert également à organiser des campagnes à l'échelle mondiale : posters, dépliants, conférences de presse, … Ces dernières années, l'aide que nous recevons nous a permis de réaliser plusieurs de nos objectifs. Nous avons réussi à obtenir la libération des 43 collaborateurs de Gabriela, mais également celle d'Angie Ipung. Cette militante pour la paix avait été accusée de meurtre et de détention d'armes. Pourtant, elle avait déjà plus de 60 ans ! Qu'est-ce qu'elle aurait bien pu faire d'une arme ?

Sur quelles campagnes travaillez-vous actuellement ?

Pour le moment, sur la grande campagne « I vow to fight VAW » (NDLR : VAW est l'acronyme de violence against women). Nous sommes en train de mettre sur pied un site Web interactif, qui a pour objectif d'aborder le problème et d'encourager les femmes à agir.

À quel point les femmes sont-elles victimes de violence ?

Il faut savoir qu'aux Philippines, une femme est victime de maltraitance ou d'abus sexuel toutes les 37 minutes. Et il ne s'agit là que des cas déclarés ! En tant que psychologue, je suis confrontée à plus de 700 cas par an. Bon nombre de ces femmes ne font rien de plus, car un procès coûte trop cher. De plus, elles dépendent financièrement de leur mari. Résultat : elles se retrouvent pieds et poings liés.

Le nombre de viol augmente lui aussi de manière inquiétante. Auparavant, il s'agissait de cas isolés. Mais les victimes sont de plus en plus nombreuses. Et les jeunes filles ne sont malheureusement pas épargnées : les viols sur les fillettes de 11 ou 12 ans n'ont plus rien d'exceptionnel. C'est pourquoi nous avons récemment lancé une campagne baptisée « Rage against rape ». Celle-ci s'inscrit dans le cadre de « I vow to fight VAW », une campagne plus vaste.

Vous avez encore énormément de pain sur la planche,
semble-t-il.

C'est le moins qu'on puisse dire. Mais une chose est sûre : ce n'est pas le courage qui nous manque !

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