Au bureau national de Gabriela à Manille, il y a de la vie! Des allées et venues sans cesse! Des bénévoles vont et viennent, des membres des groupes locaux passent pour dire bonjour ou assister à une réunion et puis, il y a les employés du bureau national qui partent souvent sur le terrain.
Dernièrement, accompagnés du Gabriela Women's Party (GWP), ils se sont rendus dans la municipalité de Rodriguez (Rizal). C'est là que sont relogés les habitants expulsés par l'État. Il détruit des habitations pour étendre ses infrastructures ou permettre à des privés de construire à la place.
La visite avait pour but d'enquêter sur les conditions de vie des habitants ainsi que de les réunir pour qu'ils en discutent. Pendant que des femmes étaient interviewées chez elles par Gabriela, des membres du GWP en informaient d'autres sur leurs droits en matière de logement, droits que l'État est loin de respecter ! Lors de cette table ronde, chacun pouvait raconter les problèmes qu'il rencontrait et expliquer ce qu'il faisait pour s'en sortir. Ci-dessous, voilà ce qui ressort de cette “fact-finding mission”.
Tout d'abord, parlons de la distance entre les anciennes et nouvelles habitations. Les habitants de San Juan (et d'autres familles des alentours de Manille) ont été transférés dans une autre province. C'est certes la province d'à-coté mais pour aller jusqu'à la capitale, il y a une trotte ! Cela engendre des pertes d'emplois. En effet, plus possible de garder son ancien travail. C'est trop loin pour s'y rendre. Les jeepneys ne vont pas jusqu'ici. Il faut marcher longtemps pour arriver au dépôt. Alors, il y a deux solutions : soit on cherche du travail près de chez soi - parfois, on en trouve mais ce sont des petits boulots encore moins payés qu'avant -, soit seul le mari continue à travailler ; ça fait moins de rentrées d'argent. Il passe alors la semaine en ville et rentre pour le week-end, enfin certains week-end. D'après ce que les femmes savent, sur 10 couples, il y en aurait 7 infidèles, le mari ayant trouvé quelqu'un d'autre en ville.
Deuxièmement, il y a les maisons. 35m² pour une famille. Généralement, on y vit à 4 ou plus. La qualité des habitations est mauvaise. Un homme qui a participé à la construction de celles-ci nous a expliqué que les ouvriers utilisaient trop peu de ciment, que les murs n'étaient donc pas solides (certains logements construits il y a quelques mois sont déjà fissurés) et que les toits étaient à peine plus épais qu'une boîte en fer. A l'intérieur, il y a un WC et un robinet. Selon l'enquête de Gabriela, l'eau n'a pas été raccordée tout de suite. Idem pour l'électricité. Les prix de ces deux ressources sont assez élevés. A cela, il faut ajouter le prix de la maison. Car, oui, l'État les reloge, mais tout est à leurs frais. La plupart ne possède pas encore la maison. Ils ont 30 ans pour l'acheter. En attendant, ils paient un loyer tous les mois et de cette manière, « accumulent » de l'argent pour acquérir la maison plus tard. En ce qui concerne le prix mensuel, il est fixe et faible pendant les premières années mais augmentera par la suite.
Lors de cette fact-finding mission, nous avons pu rencontrer des habitants arrivés il y a moins d'un mois. A priori, c'est là qu'ils vont passer le reste de leur vie. Pour le moment, ils vivent dans les travaux. Les quartiers ne sont pas encore achevés. Il y a de nouveaux sites en construction. L'Etat et son injuste politique d'expulsion n'ont pas fini de faire des dégâts...