Répression, violence, peur. Chacun sait qu’aux Philippines, le non-respect des droits de l’homme est une réalité hélas quotidienne. Heureusement, certaines organisations telles que Gabriela tentent de faire changer les choses. Ello Mobile ne reste pas non plus les bras croisés. Nous suivons Avir, une collaboratrice de Gabriela, dans son combat contre les injustices dont sont victimes les femmes.
Tuklas
Avir n’est pas une femme comme les autres. Sans mari ni enfants, voilà déjà 15 ans qu’elle oublie ses propres problèmes pour se consacrer corps et âme à ceux des autres. Un cas pour le moins inhabituel aux Philippines… Presque une prise de position. Avec l’aide de quelques autres « organisateurs » de Gabriela, elle se bat pour le respect des droits de l’homme à Tuklas, une petite communauté de 300 habitants établie à Muntinlupa. Cette localité fait elle-même partie de la métropole de Manille, une région dans laquelle les bidonvilles s’étendent sur plusieurs kilomètres à la ronde. Tuklas n’est que le sommet de l’iceberg. Certes. Néanmoins, cette communauté constitue un bon point de départ pour encourager l’aide au développement et lancer une croisade contre l’injustice.
Premiers contacts
Avir travaille depuis deux ans déjà à Tuklas en compagnie de quelques autres défenseuses des droits de la femme de Gabriela. Si elles ont choisi cet endroit, c’est parce qu’elles savaient que d’autres organisations réputées y étaient déjà actives. En quoi consiste leur approche ? Pour commencer, elles tentent d’aborder les habitantes au travers de thèmes qui leur tiennent à cœur, tels que les enfants, la santé et le logement. La première activité est systématiquement la même : une explication théorique des besoins élémentaires à satisfaire pour s’assurer une bonne santé. Hélas, peu d’entre elles ont la possibilité de consacrer deux heures à cette séance d’information. Aussi Gabriela se fait un plaisir d’accueillir mères et enfants. En abordant les femmes dans le cadre de leur vie de tous les jours, Gabriela gagne progressivement la confiance de la communauté et crée ainsi tout aussi progressivement un sentiment de solidarité.
Clinique
Après quelques présentations, une clinique est créée. Gabriela y propose aux femmes un examen médical complet et entièrement gratuit.
Cette clinique, ainsi que de nombreuses autres initiatives, donnent à ces femmes une force nouvelle et un point de repère commun. C’est également le cas des multiples discussions qu’elles ont avec Avir et ses collègues sur l’insécurité, la détresse face à la violence dont elles sont victimes, l’accès insuffisant aux soins de santé et les frais de scolarité de leurs enfants. Avir écoute, conseille et rassure les femmes, toujours avec le sourire. Son objectif : apporter une aide inconditionnelle, ce dont les femmes de la communauté sont d’ailleurs conscientes. Après s’être fait maltraiter pendant des années par des hommes, des groupements et des organisations, elles osent à nouveau nourrir l’espoir d’une vie meilleure. La création de la clinique constitue une étape essentielle de cette prise de conscience, tout comme celle d’une pharmacie où peuvent se rendre les mères en compagnie de leurs enfants en vue d’y obtenir les médicaments adéquats.
Avir n’est ni médecin, ni infirmière et ne manque pas d’en informer clairement les collaborateurs médicaux en formation. Tout ce qu’elle sait, elle l’a appris de ses collègues. Si elle n’est pas qualifiée pour diagnostiquer des maladies graves, elle est n’en est pas moins capable de traiter une grippe ou une diarrhée persistante. Un jour seulement après l’ouverture, 20 enfants avaient déjà été soignés et autant de mères inquiètes rassurées. Les habitants ne peuvent habituellement pas se permettre de se rendre dans un véritable cabinet médical, car le prix des consultations et des honoraires est impayable. Chaque activité est suivie d’une évaluation : les femmes y partagent leurs expériences et nouvelles connaissances et expliquent la manière dont leur vie en a été améliorée. Cette évaluation renforce l’identité et la cohésion du groupe.
Sensibilisation
Une fois la phase de prise de conscience autour du thème de la santé achevée, Gabriela entame la phase de sensibilisation à la politique. Divers sujets importants sont abordés dans le cadre de différents forums, allant des expulsions à la violence dont sont victimes les femmes, en passant par la politique inhumaine du gouvernement philippin. Ces discussions permettent aux femmes de découvrir qu’elles ne sont pas les seules à vivre cette situation et leur donnent le courage de se battre pour changer les choses, ce qui aurait été impensable auparavant.
Une journée typique
Avir n’a jamais le temps de s’ennuyer. Diriger une clinique le matin, assister à une réunion du groupe de travail local l’après-midi et participer à une réunion au siège local de Gabriela. Ce siège n’est rien de plus qu’une simple maison dans laquelle des femmes défilent du matin au soir. Elles entrent, racontent leur histoire, reçoivent des conseils et ressortent. Lorsque l’agitation diminue, Avir en profite pour programmer la journée du lendemain. Elle espère convaincre le bourgmestre de lui donner l’autorisation de créer un jardin de plantes aromatiques, ce qui permettrait aux femmes de cultiver elles-mêmes leurs médicaments phytothérapeutiques. Mais elle voit bien plus loin que le lendemain. Elle organise déjà les semaines, les mois et les années à venir. Elle a pour projet de développer encore plus rapidement le groupe de travail de Tuklas. Afin de pouvoir optimiser le déroulement des activités, il lui faut encore au moins 30 nouveaux membres. Dès que le groupe possédera suffisamment de main d’œuvre, qu’il fonctionnera de manière autonome et que les femmes seront capables de se défendre seules, Avir et les autres collaborateurs auront accompli leur mission et viendra l’heure des adieux.